-
Publié le 24/10/2025 4 minutes de lecture
“Bianvnu à Saint-Pierre Port”, proclame un panneau sur le quai de la principale localité de Guernesey. Une pointe de français dans une saveur toute britannique... vous venez de goûter à votre première gorgée de l'étonnant cocktail des anglo-normandes. Des îles entre deux eaux et entre deux pays.
Aux temps géologiques, elles se sont séparées des rivages du Cotentin, en Normandie. Plus près des côtes françaises que des rivages anglais, donc. Mais l’histoire a ajouté son grain de sel aux embruns du Channel et a fait des îles des dépendances de la couronne britannique. Au final, les Channel islands sont anglo-normandes dans tous les sens du terme, et c'est bien ainsi. Guernesey et les îles qui la bordent, avec leur originalité et leur douceur de vivre résolument attachantes, en offrent un parfait exemple.
Sur les traces de Victor Hugo à Guernesey
Victor Hugo disait des îles qu'elles sont “des morceaux de France tombés dans la mer et ramassés par l'Angleterre”. L'auteur y a surtout vu un havre où poser ses valises en 1855, lorsque son opposition au Second Empire l'oblige à s'éloigner de la France de Napoléon III. Son exil à Guernesey durera 15 ans. Dans le jardin qui porte son nom à Saint-Pierre Port, on peut voir une altière statue de l'écrivain, cape de pierre dans le vent, tournée vers la France.
Mais c'est la Hauteville House, la maison qu'il acheta au cœur de la ville, qui attire surtout les visiteurs. Aujourd'hui propriété de la ville de Paris, cette demeure située à quelques centaines de mètres de celle où il avait installé sa maîtresse Juliette Drouet ouvre une fenêtre méconnue sur l'intimité de l'écrivain. Tapisseries, chinoiseries, boiseries sculptées... elle est surchargée de décoration et d'ornements, souvent réalisés ou dessinées par l'hyperactif Hugo. Le must est à l'étage : le bureau-véranda tout orné de faïences où il écrivait debout, face à la mer. C'est ici qu'il acheva Les Misérables et écrivit Les Travailleurs de la mer, véritable hommage à l'île.
Rudesse et douceur
À l'époque, la prospérité de Guernesey reposait sur la pêche, les carrières de granit et la construction de trois-mâts qui partaient chercher le thé et le café par-delà les océans. Aujourd'hui, les sources de revenus de ses 64 000 habitants sont la finance (l'île a une fiscalité très avantageuse, au point d'avoir été par le passé qualifiée de paradis fiscal), l'élevage, les produits laitiers, la pêche et… le tourisme.
En 1883, déjà, Renoir avait été séduit. L'impressionniste avait notamment peint la baie de moulin Huet, qui commémore encore aujourd'hui son passage. Guernesey et les îles qui la bordent ont gardé ce mélange de rudesse et de douceur qui avait ému le peintre. Le charme d'un monde à part.
Sur ces îles réchauffées par le gulf stream, qui ne connaissent que quelques rares jours de gel par an, on croise des palmiers et des lys originaires d'Afrique du sud. Mais elles sont aussi le point le plus méridional où l'on peut observer des macareux, sympathiques oiseaux marins aux gros becs oranges et aux yeux qui semblent soulignés d'un trait d'eye-liner, généralement plus habitués à des rivages situés plus au nord.
Sercq, le charme de la simplicité
Pour les amateurs de nature, les Guernsey islands sont une bouffée d'air frais. Rien ne vaut pour respirer qu'une virée à Sercq, à 40 minutes de ferry de Saint-Pierre Port. "L'île est un voyage dans le temps et c'est un jour idéal pour la découvrir", m’a dit une anglaise bien mise au moment d’embarquer sous un ciel nuageux comme une toile de Turner.
À l'arrivée : des vélos, des fleurs, quelques tracteurs et pas de voitures… on pourrait presque se contenter de ces mots pour décrire cette île dont le charme rime avec simplicité. Mais Sercq est bien plus que cela. Quand le soleil est caché, elle affiche un ambiance qui évoque les terres scandinaves. Quand l'astre se montre, il fait luire ses eaux d'un azur quasi tropical. À vélo, on oscille avec ces deux ambiances en dépassant à coups de pédale ses landes frangées d’écume et peuplées de plus d’oiseaux que d’humains.
L'île compte à peine plus de 550 d'habitants. À leur tête, le dernier seigneur d'Europe (vous avez bien lu) représente la couronne britannique. On le croise, lui aussi à vélo, sur les chemins de l'île. Mais seigneur il est : la quasi totalité des membres de la famille royale ont diné ou même passé la nuit sans sa solide demeure de granit.
Herm : déconnexion et sable blanc
Sercq s'étend sur 5,4 km2. Si c'est encore trop pour vous, mettez le cap sur Herm. Superficie : 2 km2. Population : à peine 60 habitants. Signes particuliers : les TV s'y comptent sur les doigts d’une main et les seuls véhicules sont quelques buggies poussifs. Bordée de récifs, entre Sercq et Guernesey, l'île est synonyme de déconnexion.
On y trouve quelques cafés, deux hôtels, des campings et hébergements de plein-airs, mais surtout de grandes plages de sable clair. Chaque année, Herm attire son lot d'amateurs de calme, d'air marin et de séjour décontracté et hors du temps. Dans le hall de l'hôtel The White House, quatre pendules donnent l'heure à Paris, Londres, New York et Herm. Les aiguilles de cette dernière ont été retirées. Ici, le sablier du temps ne s'écoule plus à la même vitesse.
Guernesey : le carnet pratique
Découvrez tous les infos pratiques pour organiser votre excursion sur les îles Guernesey.
Comment aller à Guernesey ?
En Ferry depuis Saint-Malo, avec un nouveau service de Brittany Ferries qui permet un aller-retour dans la journée. En avion depuis Paris avec la compagnie aérienne Aurigny.
Des liaisons en bateau sont assurées entre Guernesey et Herm et entre Guernesey et Sercq.
Où loger sur les îles Guernesey ?
À Guernesey, le Duke Of Richmond est une valeur sûre classique à Saint-Pierre Port et le Renoir Cottage, souvent réservé très longtemps à l'avance, offre une immersion dans les paysages de Renoir. À Sercq, rien n'égale le charme du Stocks Hotel et de sa maison d'hôte attenante, Le Grand Dixcart.
Pour plus d'infos pratiques, consultez le site officiel de l'office de tourisme des îles Guernesey.