
On trouve des cercles de capoeira, ou rodas, sur les plages de Bahia. © © Golero / Getty Images
Texte par
Bridget Gleeson (traduit de l'anglais par Vincent Guilluy)
Mis à jour le : 17 janvier 2018
Il est facile de voir pourquoi les Brésiliens ont surnommé Bahia a terra da felicidade (le pays du bonheur). Cet État du nord-est, avec sa côte baignée de soleil, est un paradis tropical et sa capitale, Salvador, accueille un des plus grands carnavals du monde. Mais un coup d'œil aux armoiries officielles de Bahia avec leur devise en latin, per ardua surgo (je m’élève dans l’adversité), indique une histoire plus tourmentée. Bahia n'est pas que soleil, sable et défilés de rue : dès le XVIe siècle, l’État fut un centre du trafic d'esclaves. Quatre millions d’esclaves africains arrivèrent en Amérique par le Brésil ; près d’1,5 million d’entre eux passèrent par Salvador et furent immédiatement envoyés travailler dans les plantations de sucre voisines.
Aujourd’hui, Bahia est une terre de contrastes baignée de traditions culturelles africaines. Pour profiter au mieux de la capitale haute en couleur de l’Afro-Brésil, faites comme ses habitants. Savourez le présent, et profitez de la plage – mais n’oubliez jamais le passé, même quand la fête bat son plein. Voici nos premières suggestions.
La capoeira – une forme d’art afro-brésilienne qui mêle arts martiaux et danse – est née dans les plantations de sucre de Bahia, où les esclaves vivaient entassés. Là, sous le couvert de la nuit, ils s’entraînaient à l’autodéfense. Pour cacher leur entraînement physique à leurs maîtres, ils se mirent à y incorporer des figures acrobatiques et des danses, et à y ajouter le rythme d’instruments de percussion rudimentaires.
Regardez la fumée qui monte des stands de cuisine et des charrettes, au bord de la plage et dans les rues. C’est là qu’on trouve les Baianas – des femmes de Bahia habillées de robes de dentelle blanche traditionnelles, avec d’épais foulards et des bijoux colorés – qui préparent des en-cas d’inspiration africaine. Le classique incontournable s’appelle acarajé, un beignet frit de haricots à œil noir écrasés.
Prenez vos billets longtemps à l’avance : le Balé Folclórico de Bahia (Ballet folklorique de Bahia), renommé dans le monde entier, présente un spectacle inoubliable au Teatro Miguel Santana. Il ne ressemble à aucun autre ballet. Le spectacle comprend des dizaines de musiciens, de danseurs et de chanteurs qui présentent un répertoire de “danses d’esclaves” traditionnelles, de capoeira, de samba et de danses de cérémonie liées au Candomblé, un culte religieux qui s’est développé dans l’Afro-Brésil. Le spectacle somptueux – avec notamment des jongleurs de feu, et des capoeiristas agiles suivant le rythme de tambours, de cloches et de percussions traditionnelles africaines – passe en revue l’histoire et la culture bahianaises.
La musique afro-brésilienne n’est pas difficile à dénicher : elle imprègne tout Bahia. À Salvador, la vie quotidienne semble rythmée par les instruments à percussion traditionnels comme le berimbau (instrument en forme d’arc utilisé pour la capoeira), l’atabaque (haut tambour de bois) ou l’agogô (clochette). Le mardi soir, allez dans le Pelourinho assister à une performance d’Olodum, un groupe de tambours afros fondé en 1979 (il figure dans la vidéo de l’hymne protestataire de Michael Jackson, They Don’t Care About Us, tournée par Spike Lee en 1995).
Ensuite, passez à l’atelier de Mestre Lua Rasta, maître de capoeira, musicien, artisan, et spécialiste des instruments de percussion afro-brésiliens. Mestre Lua Rasta tanne lui-même son cuir, il va chercher son bois sur une île face à Salvador, dans la baie, et rapporte ces matériaux à son atelier pour fabriquer des instruments uniques, superbes. On peut lui en acheter un, ou prendre un cours de percussions.
Ne le cédant qu’à celui de Rio de Janeiro en termes de dimensions, le carnaval de Salvador attire plus de deux millions de fêtards durant la semaine qui précède le mercredi des Cendres. À Bahia, la fête est centrée sur la musique, avec des défilés de blocos afros (troupes de tambours) et de trios elétricos (camions ou chars avec sonos et scènes pour concerts ambulants) qui traversent lentement les rues pleines de festivaliers.