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Publié le 17/02/2021 4 minutes de lecture
Nombre d’entre nous cherchent des voyages authentiques, et veulent vraiment connaître l’endroit qu’ils visitent et ses habitants. Cette authenticité est devenue un argument de vente, notamment en matière d’hébergements, comme nous l’explique John Walton.Essayez de retrouvez, sans réfléchir trop longtemps un souvenir de voyage où vous êtes vraiment senti immergés dans un endroit. Où êtes-vous? Pour ma part, je suis au Japon, à faire griller à ma table de délicieuses Saint-Jacques fraîchement pêchées, dans un petit cabanon de bois, la péninsule de Shiretoko, à Hokkaïdo, avant d’attaquer un donburid’oursins et de crabe au riz. Délicieux! Et je suis entouré de Japonais qui font exactement la même chose.Mais est-ce une expérience authentique? Ce restaurant, Jun no Banya, apparaît en fait dans une série TV japonaise, Kita no kuni kara ("Du pays du Nord"), et il était plein de fans japonais de la série (ou peut-être de simples amateurs de fruits de mer). Ainsi, malgré les bateaux de pêche, les filets, etc., la chose n’était peut-être pas réellement “authentique”? Je dirais que si, bien au contraire. Je pense que se rendre dans un restaurant que les Japonais viennent voir de très loin est absolument authentique, et adopter leur comportement fait, à mon avis, partie du plaisir du voyage.
Il en va de même pour les hébergements. Au Japon, par exemple, ceux qui arrivent dans le pays auront presque sûrement déjà vu les hôtels de la chaîne Toyoko Inn, des bâtiments dans les divers tons de beige avec une enseigne de néon bleu, à proximité des gares, des quartiers d’affaires et même des aéroports.Hôtels d’affaires
Au Japon, on les appelle “hôtels d’affaires”, et ce sont les hébergements parmi les moins chers, souvent à moins de 50$ US par nuit (en dehors de Tokyo) pour une chambre avec salle de bain indépendante, un bon Wi-Fi, une télécommande de clim/chauffage individuelle et un solide petit déjeuner inclus. Ils se ressemblent tous, mais c’est une expérience toute japonaise, jusqu’au bidet et à la baignoire profonde.Même dans ces hôtels impersonnels, J’ai vécu des expériences mémorables et, j’ose le dire, authentiques du Japon moderne. Je me rappellerai toujours avoir partagé ma table pour un curry (offert) dans un des hôtels de la chaîne, dans la préfecture rurale d’Hiroshima, et passé un moment fantastique à regarder des matchs de sumo en compagnie d’hommes d’affaires japonais de plus en plus soûls. Entre Google Translate sur mon iPhone, quelques phrases basiques en japonais et leur anglais datant du lycée, nous avions fait de notre mieux pour vider le distributeur de canettes de bière de l’hôtel.
Était-ce alors le Japon authentique ou non? Était-ce moins japonais que, disons, une nuit à 500$US dans un ryokan traditionnel avec des tatamis et un futon, ou une machiya de Kyoto louée via une plateforme en ligne? Et quid de la location d’un appartement en ville meublé chez Ikea?Airbnb et autres plateformes de locations saisonnières adorent affirmer que leurs produits sont plus authentiques que les hôtels. Mais, ceux qui voyagent souvent le savent bien, on trouve très souvent sur ces plateformes des hébergements quelconques et sans cachet. Et la surconcentration de tels hébergements dans certains quartiers peut même détruire l’authenticité qu’ils vantent tant.“Airbnbisation”
Dans un pays étranger, on peut faire des expériences bien différentes selon qu’on choisit un hôtel de chaîne occidentale ou de chaîne locale. De même, “l’Airbnbisation” du design signifie qu’on peut louer à Marrakech, Melbourne, Marseille, Morioka, Montevideo ou Miami – des appartements qui se ressemblent, jusqu’au mobilier qui peut être identique.Mais j’ai aussi goûté à la véritable authenticité en louant une maison à moi tout seul: à Perth, j’ai séjourné dans une annexe de vacances à flanc de colline, bordée d’eucalyptus, avec une vue superbe sur l’ouest de la ville (et le coucher de soleil) depuis mon balcon, et mon propriétaire m’a invité plusieurs fois à déguster les délicieux vins locaux.
La clé de l’authenticité, en bien ou en mal, ce sont les gens. Du côté positif, voyager permet de rencontrer et de découvrir des personnes qui vivent bien différemment de nous, d’apprendre de nouvelles choses sur le monde et sur nous-mêmes. Du côté négatif, le tourisme de masse vide souvent un lieu de son âme – et de ses habitants. Il suffit de voir les problèmes que rencontrent de nombreuses villes où des habitations sont transformées en locations de vacances, ou l’effet d’un tourisme à fort impact social mais faiblement redistributif, comme par exemple l’impact des enterrements de vie de garçon/jeune fille sur les centres-villes et sur l’économie non festive, qui existaient bien avant la généralisation de la location d’appartements via des plateformes Internet.B&B
Alors, comment trouver cette authenticité? Si c’est elle que je cherche, je me tournerai vers un bon séjour chez l’habitant ou un bon vieux bed&breakfast. Avant que je vienne habiter en France, mes séjours en chambres d’hôtes, équivalent français des B&B, avec souvent un dîner partagé avec mes hôtes, étaient de très bonnes manières de me plonger dans la culture régionale des lieux que je visitais. Pour mon tout premier voyage à Tokyo, j’ai séjourné dans la chambre d’amis d’une charmante ancienne hôtesse de l’air, dans les faubourgs. Elle m’avait tout expliqué, de la façon dont les trains tokyoïtes fonctionnent à la fondue shabu-shabu.L’authenticité, c’est le lien entre les gens. Et si c’est ce que vous recherchez, vous pourrez la trouver dans des types d’hébergements très divers.
Traduit par : Vincent Guilluy