Lisbonne : Les Incontournables

Se perdre dans l'alfama de style maure

Si Lisbonne s'est en grande partie effondrée lors du tremblement de terre de 1755, l'Alfama aux allures de médina est resté intact grâce à ses fondations solides. Ses pavés ont été successivement foulés par les Romains, les Maures amateurs de bains qui lui donnèrent le nom d'al-hamma (« sources » en arabe) et les croisés qui prirent la ville en 1147. À votre tour de les arpenter.
Ranger votre carte pour flâner au hasard des rues empreintes de beauté où retentissent les conversations. Le cœur du quartier est sillonné de petites travessas (ruelles) taillées à flanc de colline et de becos (culs-de-sac) tortueux bordés de maisonnettes aux teintes citron et rose. Vous découvrirez dans le labyrinthe des allées, des vêtements en train de sécher, des femmes échangeant les derniers mexericos (ragots), des chapelles écrasées de soleil et des praças (places) où les fontaines gargouillent à l'ombre des palmiers. Partout, des points de vue s'ouvrent sur le Tage et sur le Castelo de São Jorge qui domine la ville.
Ne manquez pas l'Igreja de São Vicente da Fora, avec son cloître revêtu d’azulejos, et l'insolite façade taillée en pointe de diamant de la Casa dos Bicos, bâtie au XVIe siècle pour la famille d'Afonso de Albuquerque. Les briques couleur miel de la cathédrale romane Sé et le panorama depuis le Miradouro da Senhora do Monte méritent une photo. Offrez-vous un déjeuner de sardines en plein air à la Porta d'Alfama en profitant de l'animation avant l'heure de la sieste.
Enchanteur le jour, l'Alfama dévoile son âme le soir, lorsque les accords du fado résonnent dans ce quartier qui l'a vu naître. Ces chants mélancoliques parlant de courses de taureaux, d'amants jaloux et d'époux perdus en mer saisissent l'esprit lisboète et sont l'expression de la saudade (nostalgie). Des fadistas professionnels attirent les foules dans les caves du Clube de Fado, mais pour le fado vadio (fado amateur), essayez A Baîuca. Assis dans un bar à fado délicieusement suranné, vous aurez l'impression que l'Alfama est un village et que vous faites partie de la família.

Faire la tournée des bars dans le bairro alto

Quand les jeunes hommes lisboètes disent à leurs grands-parents qu'ils vont au Bairro Alto, ils récoltent des regards désapprobateurs. Pendant des années, ce quartier ouvrier a été le lieu où l'on venait s'encanailler avec des filles faciles pour oublier le poids de la dictature de Salazar. Aujourd'hui, les belles de nuit ne rôdent plus dans les allées obscures, et les taudis couverts de tags se sont transformés en boutiques chics, galeries avant-gardistes, petits bistros et minuscules bars pleins de charme.
Le Bairro Alto est le caméléon de Lisbonne : morne et sans éclat le jour, il s'anime à la nuit tombée. Les lanternes s'allument, les volets s'ouvrent, une odeur d'ail s'échappe des cuisines en sous-sol, des fados sortent des restaurants populaires et les taxistas (chauffeurs de taxi) foncent à travers les ruelles étroites, forçant les piétons à faire un bond de côté pour les éviter. Une atmosphère de fête s'abat sur le quartier, l'occasion de passer encore une noite en claro (nuit blanche).
La tournée des bars commence au coucher du soleil dans le cadre branché du Noobai Café, avec sa vue sur les lumières de Lisbonne. À minuit, l'animation bat son plein aux alentours de la Rua do Norte, de la Rua da Atalaia et de la Rua do Diário de Noticias, où les bars rivalisent de décibels à coups de merengue, de rock, de groove des années 1980 et de techno. Les clients se pressent au Portas Largas pour siroter une caipirinha avant d'aller danser au Frágil, en face. Les jeunes prennent le chemin du Bicaense, à Santa Catarina, ou du Ginjinha das Gáveas, où les boissons bon marché et la musique attirent les étudiants.
Plus tard dans la nuit, le Barrio Alto prend des airs de carnaval de Rio. La festa déborde dans les rues et chacun est invité à y participer. Comme les Lisboètes, allez dehors pour bavarder et boire avant d'aller écouter un concert matinal au Music Box ou d'enflammer la piste de danse du Lux, au bord du fleuve. Pas étonnant que le Bairro Alto soit si éteint en journée : même les fêtards doivent se reposer…
 

Explorer Lisbonne dans le tram N°28

Le tram n°28, avec sa couleur jaune vif, ses chromes étincelants, et son intérieur bois, constitue l'attraction idéale. Mode de transport pittoresque, il rappellera de bons souvenirs à tous ceux qui se régalaient dans les parcs d'attractions. Le trajet de Campo Ourique à Martim Moniz offre 45 minutes de vues époustouflantes, de secousses et de montées extraordinairement raides.
Le tramway avance par à-coups, dans un sifflement de freins, alors qu'apparaissent la coupole rococo de la Basílica da Estrela et les palmiers du Jardim da Estrela. Il emprunte les avenues arborées du riche quartier d'Estrela, d'où l'on aperçoit les eaux bleues du Tage, avant de marquer une brève halte sur la Praça Luís de Camões. Roulant lentement dans les rues de la Baixa, bordées de grandioses édifices élevés par le marquis de Pombal après le séisme de 1755, il s'arrête pour laisser monter des foules de passagers joyeux, qui viennent s'entasser à l'intérieur.
Cliquetant et vibrant, le tramway entame l'ascension jusqu'à l'Alfama, tandis que les passagers se penchent à la fenêtre pour photographier la Sé. L'excitation monte alors que le tram grimpe la colline, prenant de la vitesse pour négocier les virages en épingle à cheveux. Une senhora (femme) traverse la rue – le tramway pile dans un crissement de freins, la manquant de justesse, les passagers soupirent de soulagement, le chauffeur les tranquillise d'un grand sourire.
Le tram ralentit et suit le Largo das Portas do Sol au sommet de la colline. Au-dessus s'élève la silhouette fortifiée du Castelo de São Jorge, tandis que plus bas s'étend l'Alfama, mosaïque de toits rouges et de maisons pastel. Le tram reprend de la vitesse et emprunte des rues étroites et escarpées jusqu'au Largo da Graça, où la plupart des passagers descendent pour visiter le cloître de l'Igreja de São Vicente da Fora.
Du plaisir, de l'excitation et la découverte des grands sites en 45 minutes : qui dit mieux ? Pas étonnant que beaucoup n'aient qu'une envie : recommencer.

Boire une ginjinja sur le largo de são domingo

Au crépuscule, quand la lumière s'adoucit, les Lisboètes se pressent devant le minuscule A Ginjinha, un verre de ginjinha (liqueur de cerise) à la main. Une boisson pour femmelette, pensez-vous ? Détrompez-vous. Dans les années 1840, un moine du nom d'Espinheira eut l'idée de faire fermenter des cerises aigres ginja dans de l'alcool ; le résultat se laissa boire comme du petit lait. Depuis, le plus ancien bar à ginjinha de Lisbonne continue d'accueillir les clients, hommes âgés coiffés de casquettes ou couples d'amoureux qui viennent s'offrir une minute de pur plaisir pour 1 €.
Suivez leur exemple et commandez un verre de ce breuvage, sem (sans) ou com (avec) cerises. Pour être honnête, le goût ne plaira pas à tout le monde. Cependant, l'important n'est pas la boisson mais tout ce qui va avec : voir le serveur aligner les verres en plastique sur le comptoir, parvenir à sortir sans renverser une goutte de votre verre, contempler le spectacle du Largo de São Domingos. Des femmes africaines parées de violet et de jaune éclatant passent comme des papillons exotiques, des rythmes brésiliens se mêlent au bourdonnement des conversations, le château rayonne d'une lumière dorée sur la colline. Le tout est captivant, surtout après deux ou trois verres, quand on commence à se sentir l'âme poête d'un nouveau Pessoa…

Se jeter à l'eau sans se mouiller à l'oceanário

Aucun mot ne peut décrire le second plus grand océanarium d'Europe, l'Oceanário, où 8 000 espèces s'ébattent dans sept millions de litres d'eau de mer. D'immenses aquariums abritent des raies pastenagues léopards et des bancs de tétras néons dansant comme des lumières stroboscopiques aquatiques – un éclat de bleu électrique ici, une étincelle de rouge vif là –, tandis que des prédateurs tentent de dévorer à travers le plexiglas les petits doigts d'enfants surexcités criant : tubarão ! (un requin !).
Les grandes stars du lieu sont les loutres de mer Eusebio et Amália, qui effectuent des sauts périlleux sous les exclamations émues de la foule. On peut aussi voir des manchots de Magellan, de timides dragons de mer, de grands poissons-lunes, des poulpes géants aux immenses tentacules et des méduses communes, les soucoupes volantes du monde sous-marin. Le tout est assorti de nombreuses informations ; on apprend ainsi que « l'otarie possède la fourrure la plus épaisse du monde ». Résultat : un aquarium écologiquement exemplaire, sans ostentation, aux habitats réalistes et aux poissons heureux de vivre.

Admirer l'architecture manuéline du mosteiro dos jerónimos

Un véritable feu d'artifice architectural vous attend dans le plus bel édifice manuélin de la ville, le Mosteiro dos Jerónimos. Les décorations en pierre de ce monastère du XVIe siècle, aussi fines que de la dentelle, arborent des motifs inspirés de la nature : voûtes festonnées, tourelles ornées de torsades et de coquillages, colonnes où s'entremêlent feuilles, vignes et nœuds marins. Cette beauté lui a valu d'être inscrit au patrimoine mondial par l'Unesco en 1983.
L'émerveillement commence dès l'entrée dans le cloître bordé d'arcades, à la décoration complexe et richement symbolique ; ne manquez pas les singes ailés et les sangliers qui ornent la balustrade supérieure. Dans la chaleur de la journée, les arcades offrent un havre de fraîcheur et un jeu de clair-obscur digne du Caravage. Dans l'église, les piliers semblables à des arbres s'élèvent vers une splendide voûte de pierre ambrée.
Manuel Ier fit construire ce chef-d'œuvre en 1501 pour saluer les exploits maritimes de Vasco de Gama, qui partit pour l'Afrique en 1497 et revint, chargé de poivre et de cannelle, après avoir découvert la route des Indes. La visite du monastère vous renverra à l'âge des grandes découvertes, à des voyages vers des terres encore inexplorées.

Se régaler dans les pastelarias de Lisbonne

Les pastelarias (pâtisseries) sont à Lisbonne ce que les pubs sont à Londres. Vous en trouverez un peu partout, regorgeant de douceurs qui allègent votre porte-monnaie, alourdissent votre silhouette et vous offrent un instant de pur bonheur. L'initiation à cette tradition séculaire qu'est la dégustation des gâteaux portugais commence avec les pastéis de nata (tartelettes à la crème), confectionnées à la perfection par l'Antiga Confeitaria de Belém. Depuis 1837, on fabrique ici de petites merveilles culinaires : une crème légère et pas trop sucrée, une magnifique croûte dorée et de délicieuses couches de pâte feuilletée caramélisée. Mais c'est le cadre qui vous séduira le plus : les effluves de bica (expresso) fraîchement torréfié qui vous chatouillent les narines, les miroirs Art nouveau où se reflète l'opulence dorée de la décoration, les plaisanteries échangées dans un portugais hésitant avec le client assis près de vous au comptoir, les restes de crème qui luisent dans l'assiette quand vous vous levez pour partir. Pas étonnant que les Lisboètes apprécient autant les pastelarias. Pour vivre pleinement cette expérience, essayez des adresses comme la Confeitaria Nacional, Versailles et la Pastelaria São Roque.

Grimper jusqu'aux miradouros

Vous risquez fort de maudire cette ville si vallonnée, mais reprenez courage en vous disant que les calçadas (escaliers) sinueux et les rues escarpées de Lisbonne conduisent à des miradouros (belvédères) offrant des points de vue magiques sur la ville. Certes, il est amusant de rejoindre les hauteurs en funiculaire, mais une rude montée à pied vous fera éliminer les pastéis de nata que vous aurez absorbés.
Le spectacle qui vous attend aux miradouros en vaut la peine. La jeunesse bohème se retrouve au Miradouro de Santa Catarina pour bavarder, siroter une Sagres et admirer le Ponte 25 de Abril enjambant le ruban bleu du Tage. Vous pouvez aussi monter jusqu'au Largo das Portas do Sol pour contempler la vue sur le labyrinthe de l'Alfama et la coupole du Panteão Nacional. Voyez également le Miradouro de São Pedro de Alcântara, avec ses fontaines gargouillantes et son point de vue sur la cathédrale Sé, et surtout le Miradouro da Senhora do Monte, d'où l'on découvre un splendide panorama sur le Castelo de São Jorge.

Découvrir des trésors coloniaux au museu do oriente

Si vous ne pouvez visiter qu'un seul musée, choisissez celui-ci. Cet ancien entrepôt de bacalhau (morue séchée) des années 1940, transformé en musée et ouvert en 2008, met en lumière les liens du Portugal avec l'Asie, de l'arrivée de ses premiers explorateurs à Macao jusqu'à sa fascination toujours renouvelée pour les dieux asiatiques.
La collection comprend de beaux laques du XVIe siècle, des porcelaines Ming et des éventails en soie peints à la main qui permettent de découvrir la Chine d'autrefois. Le Timor-Oriental est aussi représenté, avec des conques dont on se servait pour prédire l'avenir et des couteaux sculptés avec lesquels on coupait le cordon ombilical des nouveau-nés. À l'étage, admirez les sculptures birmanes de 37 nats (esprits) morts de mort violente, d'époustouflants costumes vietnamiens, des effigies de la déesse indienne Yellamma décorées de plumes de paon et une poupée népalaise sans visage, utilisée pour les exorcismes. Pour plus d'informations.

Prendre la pose devant le palácio nacional de sintra

Classé au patrimoine mondial, le Palácio Nacional de Sintra est célèbre pour ses deux immenses cheminées coniques. Mélange d'architecture maure et manuéline, l'intérieur du palais vous émerveillera avec ses cours ornées d'arabesques, ses colonnes finement ciselées et ses azulejos géométriques du XVIe siècle qui comptent parmi les plus anciens du pays.
Ne manquez pas la Sala dos Cisnes (salle des Cygnes) octogonale, couverte de fresques représentant 37 cygnes au cou doré. Jetez un œil à la Sala das Pegas (salle des Pies), au plafond décoré de pies. On raconte que la reine surprit ici Jean Ier en train d'embrasser une de ses dames de compagnie. L'impudent souverain prétendit que ces baisers étaient innocents et por bem (« pour le bien »), puis fit peindre une pie pour chaque dame de compagnie de la cour.
Voyez aussi la Sala dos Brasões, qui présente les blasons de 72 grandes familles du XVIe siècle, la belle salle du Galion ainsi que la chapelle palatine et son dallage islamique. Pour finir, admirez la cuisine et ses fameuses cheminées jumelles, où l'on pourrait presque entendre le grésillement d'un cochon en train de rôtir sur une broche pour le roi… qui était aussi porté sur la gastronomie que sur l'adultère.
 

Mis à jour le : 16 mai 2018

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