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Publié le 08/02/2024 8 minutes de lecture
Dès le début du printemps, la Normandie va vivre au rythme des événements liés au 80ème anniversaire du Débarquement de la fameuse opération alliée Overlord. Au petit matin du 6 juin 1944, en pleine tempête, plus de 150 000 soldats alliés débarquaient sur les plages du Calvados et de la Manche pour libérer la France de l’occupation allemande.
Alors que les vétérans se comptent désormais sur les doigts de la main ou presque, la Normandie reste toujours emprunte de cette mémoire bien vivante à travers les histoires de familles transmises de génération en génération, ses musées, ses mémoriaux, et une architecture unique de la Reconstruction. Des incontournables plages d’Omaha Beach et d’Utah Beach, à des événements plus confidentiels dans des petites villes normandes en passant par des musées passionnants, des bals et des reconstitutions historiques, laissez-vous guider par notre itinéraire spécial D-Day.
1 - L’incontournable Mémorial de Caen
Pour commencer votre plongée dans l’histoire de l’opération Overlord, sa genèse, le choix des plages du nord-ouest de Caen etc, rendez-vous au Mémorial de Caen. Vous y apprendrez tout ce que vous avez toujours voulu savoir sans jamais oser le demander. Au-delà de l’histoire de la bataille de Normandie, vous serez aussi immergé dans l’univers du quotidien d’un bunker allemand pendant la seconde guerre mondiale et découvrirez une belle exposition permanente sur la Guerre Froide. Sachez également qu’à partir du 8 juin et jusqu’au 5 janvier 2025, l’exposition temporaire du musée « Under the red, white and blue » sera dédiée aux États-Unis de 1919 à 1944, sous le prisme du cinéma hollywoodien. Son objectif : mieux comprendre d’où venaient les jeunes soldats américains qui nous ont sauvés.

2- Cornemuses en pagaille au Pegasus Bridge
Changement de cap et d’Alliés autour du Pegasus Bridge à une petite vingtaine de minutes du Mémorial. Là, vous remonterez jusqu’à la nuit du 5 au 6 juin 1944 quand des commandos britanniques atterrirent en planeur atterrirent en planeur autour de la petite ville de Bénouville et s’emparèrent du pont éponyme, enjambant le canal allant de Caen à la mer. Rebaptisé Pegasus Bridge après la Libération par les Alliés - le cheval ailé Pégase était l’emblème des parachutistes britanniques -, il a été remplacé en 1993 par un pont plus moderne mais rassurez-vous, il est soigneusement gardé dans un Mémorial qui porte son nom auprès du cimetière militaire de Ranville à quelques kilomètres.
Après votre visite du musée Mémorial Pegasus, retour sur les bords du canal pour une petite pause mémorielle au Café Gondrée. Un véritable symbole puisqu’il s’agit de la première maison de France libérée aux petites heures du 6 juin 1944. Si l’ambiance vous plaît, restez sur Bénouville le soir du 6 juin : l’association BOWU (Bagpipers Of the World United (Joueurs de cornemuse du monde entier) organise une grande fête-concert. Vous vous demandez peut-être pourquoi la cornemuse ? Tout simplement en hommage au soldat Bill Millin alias « Bill the Piper » (Bill le joueur de cornemuse), un Écossais qui fut le premier à traverser le pont sans arme sauf son son fameux instrument !
3 - Sword, Juno et Gold : longez les plages à pied
D’est en ouest, continuez votre virée D-Day sur les plages de Sword (Ouistreham), Juno (Courseulles-sur-Mer) et Gold (Ver-sur-Mer). Chacune y vit ses régiments d’Alliés débarquer, Britanniques, Canadiens et même les fameux fusiliers marins français du Commandant Kieffer sur Sword Beach. À propos, ces noms peuvent vous sembler incongrus, ils sont tout simplement sortis de l’imagination du général britannique Montgomery qui décidé de leur donner des abréviations de poissons : gold pour goldfish (poisson rouge) et sword (espadon). Juno aurait dû s’appeler Jelly (de jellyfish : méduse), mais jelly signifiant « gelée », Montgomery a préféré préserver le moral des troupes - qui ne voulaient sans doute pas finir en gelée sur les plages - et c’est finalement le Lieutenant-Colonel canadien Dawnay qui proposa Juno, le prénom de son épouse.
De Sword à Gold, embarquez pour une longue marche d’une quinzaine de km en longeant la mer et en faisant des haltes au centre Juno Beach qui rend hommage aux 4500 Canadiens qui ont perdu la vie pendant la seconde guerre mondiale. Si vous voyagez avec vos enfants, ils adoreront les visites/balades « le D-Day raconté aux enfants », organisées par le centre au printemps et cet été.

4- Arromanches, port artificiel, bunkers et nouveau musée
Après une telle balade imprégnée de mémoire, faites une halte à Arromanches, regardez la mer baisser sur les bunkers géants échoués dans le sable comme de vieux rochers constellés de bernics et drapés d’algues, et sur le Mulberry, le port artificiel « préfabriqué » en béton qui servit pour approvisionner les troupes ayant débarqué les semaines qui suivirent le Débarquement. Le spectacle de ces pontons de béton dans la mer est toujours très prenant aujourd’hui.
Renseignez-vous auprès de l’office du tourisme pour faire du kayak ou du paddle autour de ces ruines uniques. Les voir depuis la mer est encore plus fascinant. Poursuivez votre exploration de l’histoire du Débarquement au musée d’Arromanches, tout récemment rénové et dont la muséographie immersive est particulièrement réussie. Enfin, ne manquez pas de vous baladez-vous dans les rues de cette charmante ville balnéaire épargnée par les bombes du D-Day où les amateurs de magasins vintage de vêtements et d’accessoires de mémorabilia militaire se régaleront.
5 - L’immanquable Omaha Beach, sauf le jour J !
Il est temps de poursuivre votre chemin vers la pointe du Hoc et la plage la plus connue du Débarquement, Omaha Beach… Sans pour autant marcher sur les pas du Soldat Ryan, arpentez cette plage qui s’étend sur les communes de Vierville-sur-Mer, Saint-Laurent-sur-Mer, Colleville-sur-Mer et Sainte-Honorine-des-Pertes. Ne manquez pas de grimper sur la pointe du Hoc pour vous placer côté bunkers où les Allemands tiraient sur les fantassins américains qui tentaient d’escalader la falaise.
Sachez que le Jour J, c’est à dire le 6 juin 2024 est un jour à soigneusement éviter pour une balade dans le coin. Le fameux cimetière américain de Colleville-sur-Mer - qui sera fermé au public car on y attend pléthore d’officiels dont le président Macron et peut-être même le président Biden. Visitez l’impressionnant cimetière un autre jour. La géométrie parfaite des 10 000 croix blanches - vous y verrez aussi des croissants blancs et des étoiles de David blanches - vous prendra aux tripes.
Pour vous remettre de vos émotions, et si vous êtes dans les parages un jeudi, divertissez-vous devant un petit concert ou encore participez à un bal dans une des communes environ en suivant la programmation des jeudis de la liberté, organisés par la petite ville voisine de Trévières. Et si jamais vous prévoyez de voyager dans le coin fin mai, sachez que pour débuter son périple dans le Calvados, la flamme olympique s'élancera d'Omaha Beach le 30 mai à 8h du matin. Elle arrivera par la mer depuis Vierville-sur-Mer jusqu'au monument Signal à Saint-Laurent-sur-Mer. Les relayeurs officiels l'escorteront ensuite sur la plage jusqu'au cimetière militaire américain.

6 - Utah Beach, parachutes et zeppelins
Quittez le Calvados pour la Manche limitrophe et l’autre grande plage du D-Day, Utah Beach. En chemin et pour voir "l’envers du décor », arrêtez-vous au cimetière allemand de La Cambe. Plus de 21 000 soldats y reposent. Vous serez certainement pris d’un drôle de frisson en remarquant que contrairement à celles des tombes des Alliés, les croix des Allemands sont noires. À Utah Beach, visitez le musée du Débarquement. Vous y apprendrez que cette longue plage bordée de dunes fut la première plage prise d’assaut par les Alliés au matin du 6 juin 1944, puis qu’elle fut choisie comme tête de pont dans le Cotentin afin de prendre la ville de Cherbourg et son port en eau profonde.
À quelques kilomètres, le village de Sainte-Mère-Èglise est un autre incontournable du circuit du D-Day. C’est au clocher de son église que le jeune parachutiste américain John Steele fit le mort pendant plusieurs heures pour survivre aux tirs des Allemands dans la nuit du 5 au 6 juin. Et si vous êtes fans de parachutes et autres dirigeables, mettez les voilez vers l’intérieur des terres et le Hangar à Dirigeables d’Écausseville. Vous y découvrirez un univers de passionnés d’objets volants qui partageront avec vous et vos enfants leur amour pour les zeppelins et autres dirigeables.
7 - Tour en jeep, défilé de mode et road trip sur la voie de la Liberté
Depuis Écausseville, redescendez jusqu’à Carentan pour une petite virée au Normandy Victory Museum. Dans ce musée privé, vous pourrez faire un tour en jeep, assister à des défilés de mode rétro, écouter des conférences liées à la bataille de Normandie et voir des concerts rétro ! Empruntez ensuite une portion de la Voie de la Liberté - la route commémorant la victoire des Alliés et la libération de la France, de la Belgique et du Luxembourg - marquée par des bornes kilométriques plutôt imposantes sur lesquelles vous verrez une torche jaillissant de l'océan, symbole emprunté à la statue de la Liberté, ainsi que les 48 étoiles du drapeau américain de l’époque. Roulez jusqu’à Avranches en prenant le temps de faire des pauses dans des villes telles que Saint-Lô, Marigny, Coutances puis Avranches toutes marquées par la destruction puis par des architectures de la reconstruction différentes à la fois en contraste et en harmonie avec les bâtiments qui ont survécu aux bombardements.

8 - Débarquez sur les plages de l’ouest du Cotentin
Mêlez votre balade historique au farniente en prenant le temps de vous poser sur les plages de l’ouest du Cotentin. Amusez-vous à y repérer des traces de la guerre, notamment du mur de l’Atlantique, fameux système fortifié construit par les Allemands à partir de 1941 le long des 6 000 km de côtes de l'Europe, de la Norvège à la frontière franco-espagnole. Si vous avez l’oeil, sur la plage de Jullouville, vous apercevrez à proximité des traditionnelles cabanes de plage des poteaux anti-débarquement Rommel réapparus récemment grâce aux grandes marées. À Granville, sur la pointe du Roc, votre chemin jusqu’au phare sera parsemé de bunkers tellement ardus à démolir qu’ils font désormais partie du paysage urbain de la ville.
Parcourez une dizaine de kilomètres vers le nord jusqu’à Hauteville-sur-Mer, où un camp militaire américain d’époque sera reconstitué avec tentes, véhicules, cantine le dernier weekend de juillet. Vous pourrez vous balader dans le camp, assister à des manœuvres de chars et même danser sur les sons d’époque du Swing melodies orchestra le samedi soir. Si vous aimez vous déguiser années 40 ou 50, n’hésitez pas, vous ne serez pas les seuls !
9 - Reconstitution et contre-attaque dans le sud-Manche
Après la plage, le bocage. D’Avranches, remontez vers Falaise au sud de Caen en passant par Saint-Hilaire-du-Harcouët dans le sud de la Manche. La petite ville fêtera sa libération lors d’un grand bal populaire le samedi 3 août dans un décor de plus de 80 véhicules d’époque et d’un campement réinstallé pour l’occasion. Enchaînez les 6 et 7 août en assistant à une reconstitution de la contre-attaque de Mortain, à une quinzaine de kilomètres de Saint-Hilaire. Si vous n’avez jamais entendu parler de ce pan d’histoire de la libération de la Normandie, sachez que cette contre-attaque fut décidée par Hitler lui-même contre l'avis de son état-major qui préconisait un repli des troupes. Elle fit suite à la percée d’Avranches (opération Cobra) qui permit aux troupes américaines de pénétrer en Bretagne.
10- La guerre et la libération vues par les civils
Retour vers Caen en passant par Falaise. Le Mémorial de cette ville qui vit aussi naître Guillaume le Conquérant mérite qu’on s’y attarde. Il permet d’appréhender l’occupation et la libération à travers le regard et la perception de ceux et celles qui les ont vécus au quotidien : les civils. Particulièrement bien conçu pour les familles, à travers un parcours très évocateur sur trois étages, vous serez transporté par les témoignages recueillis, émus par les archives uniques et inédites provenant du Mémorial de Caen et happé par la scénographie des objets du quotidien. Une belle façon, à la fois humaine et émouvante, de terminer votre périple D-Day.