
Le château d’Arco domine la ville éponyme © Kevin Faingnaert / Lonely Planet
Texte par
Orla Thomas (traduit de l'anglais par Vincent Guilluy)
Mis à jour le : 20 avril 2021
Incroyablement pittoresques, les Dolomites attirent les randonneurs de tous niveaux en Italie du Nord. Si elles offrent de nombreuses occasions de treks solitaires, marcher en compagnie d’un guide local permet de percer les secrets de ces “montagnes pâles”.
Le château d’Arco semble tiré d’un conte de fées. Médiéval, posé au sommet d’un éperon rocheux et entouré de cyprès, il semble fait pour garder une princesse ou un trésor. Désireuse de trouver l’une ou l’autre, je suis partie un matin d’Arco, la ville blottie à ses pieds, en compagnie d’une guide locale et historienne, Laura Tessaro.
“J’ai peur de n’avoir que deux vitesses, rapide ou lente”, me dit-elle en optant pour la seconde tandis que nous traversons la piazza principale, baignée d’un soleil matinal. Une cloche d’église marque l’heure tandis que nous descendons une rue pavée bordée de balcons où sèche du linge, ornés parfois des vrilles d’une passiflore en fleur.
“Quand j’étais adolescent, mes amis étaient en bas, au lac de Molveno, et cherchaient la compagnie des filles, mais moi je préférais rester ici, seul, à marcher dans les montagnes”, me dit Michele Zeni, qui travaille pour le parc naturel d’Adamello Brenta. Les choses ont peu changé en vingt ans sauf que maintenant, Michele est payé pour se consacrer à la nature. Il ressemble un peu à Bear Grylls, l’aventurier britannique, mais avec une douceur dans l’attitude qui n’appartient qu’à lui.
“Quand on est seul dans la nature, on fait moins de bruit, dit-il, et on peut voir plus d’animaux.” Il nourrit une grande passion pour les ours. Son regard s’allume lorsqu’il évoque la première fois qu’il en a vu un, ou les quatre heures qu’il a passées à suivre une mère et ses oursons. “Pour les anciens, l’ours était une créature magique. Il mourait chaque hiver et ressuscitait au printemps – comme Jésus.”
Tandis que le téléphérique de Grostè prend de l’altitude, je sens mon anxiété suivre la même trajectoire. Je suis ici pour affronter ma première via ferrata, un de ces itinéraires de montagnes, qu’on trouve partout dans le monde, que des câbles et des échelles rendent accessibles. Les via ferrata ont vu le jour dans les Alpes et sont très importantes dans les Dolomites, là où les soldats italiens et austro-hongrois les ouvraient dans leur rivalité pour contrôler ce champ de bataille capital de la Première Guerre mondiale.
En approchant du Sentiero Vidi, un parcours adapté aux débutants du nord des Dolomites de Brenta, c’est contre ma nervosité que je dois batailler. “Faire que les gens se détendent fait partie de mon travail”, me dit Silvestro Franchini, mon guide de montagne, en réglant mon harnais. Ancien skieur de l’équipe nationale italienne, il est visiblement à l’aise ici. “La via ferrata n’est ni de la randonnée, ni de l’escalade – elle se situe quelque part entre les deux.”
Le début est facile mais le terrain se fait vite plus pentu, le sentier étroit traverse un paysage où les arbres sont de plus en plus rares, et qui devient presque lunaire par son aridité grise. En arrivant à un passage qui paraît plus difficile, Silvestro nous encorde, m’explique comment il me retiendra si je perds l’équilibre, et me donne des conseils pour la suite. “On grimpe d’abord avec sa tête, dit-il. Puis avec les pieds, et seulement en dernier avec les mains.” Nous longeons un promontoire, bordé d’abrupts vertigineux de chaque côté, soigneusement assurés par le harnais au câble de métal. De l’autre côté, les seules autres personnes que nous rencontrerons sont un septuagénaire joyeux et son petit-fils de seize ans, qui se mesurent à la via ferrata.
Il n’y a qu’une seule façon d’arriver au Rifugio Nambino, une pension traditionnelle de montagne : à pied. Depuis un parking arboré proche de la station de Madonna di Campiglio, un sentier monte en lacets à travers une épaisse forêt, le long d’un torrent qui cascade sur des rochers moussus. Au bout de vingt minutes, j’arrive à sa source, le lac de Nambino qui donne son nom à la pension, alimenté par la fonte des neiges et qui scintille au soleil. Des jolis chalets de bois partagent ses rives avec un seul autre bâtiment, niché parmi les arbres : une petite maison aux cheminées trapues et aux volets de bois.
C’est la maison d’Eleonora Cunaccia, Noris pour ses amis, la “dame des montagnes” pour les autres. Noris vit ici tout l’été et passe ses journées à glaner des herbes sauvages et autres plantes comestibles, qu’elle fournit à des restaurants ou qu’elle transforme en produits qui se vendent en ligne.
Les vaches de Malga Juribello, une ferme proche de la station de montagne de San Martino di Castrozza, profitent de leurs vacances d’été. Ce troupeau de Brunes des Alpes, de Valdostaines pies rouges et de Holstein passe les mois de juin à septembre loin de sa ferme de plaine habituelle dans d’excellents pâturages, à 1 900 m d’altitude. Mon arrivée à pied en compagnie de Claudio Valorz les déconcerte. Claudio est le fermier qui prend soin de cette malga – mot qui signifie à la fois “pâturage de montagne” et “refuge de montagne” – depuis près de vingt ans.
“Je suis retraité, admet-il, mais je viens toujours, pour le plaisir. Chaque année, la montagne me rappelle.” On comprend bien pourquoi. La chaîne des Pale di San Martino dominant les prairies vert vif offre un paysage d’un charme bucolique tel qu’on croirait le décor d’une publicité pour du chocolat. Et comme sorti d’un casting, un jeune apprenti agriculteur bien bâti s’est assis sur un tabouret pour une démonstration de traite à la main. Si on ne la pratique plus guère aujourd’hui, la plupart des fermiers sont fiers de maîtriser cette technique. “Les jeunes retrouvent de l’enthousiasme pour l’agriculture, dit Claudio. Au lieu de partir en ville, ils sont plus nombreux à rester au pays et y travaillent en se servant des technologies nouvelles.”
L’aéroport le plus proche de des Dolomites du Trentin est celui de Vérone (Verona), mais on peut aussi atterrir dans les villes voisines de Milan ou Venise, ou arriver par Innsbruck, en Autriche. Les transports en commun sont limités dans cette région rurale, et il vaut mieux louer un véhicule à l’aéroport.
Dans les Dolomites du Trentin, les authentiques refuges de montagne sont de merveilleux endroits où s’imprégner de l’atmosphère particulière de la région et goûter la cuisine locale bien particulière, plus alpine que typiquement italienne. Réservez une chambre avec balcon au Rifugio La Montanara pour avoir une vue de premier ordre sur les sommets, et ne manquez pas de séjourner au Rifugio Nambino, au bord du lac. À Arco, Garni On the Rock est une bonne base de départ ; à San Martino di Castrozza, nous recommandons l’Hotel Cima Rosetta.
Le site Internet de l'Office du tourisme est plein de suggestions et de conseils utiles pour préparer votre voyage. Certaines régions des Dolomites du Trentin comme Madonna di Campiglio ont aussi leur propre site, utile.
Orla Thomas est allée dans les Dolomites avec le soutien de Visit Trentino. Les contributeurs de Lonely Planet n’acceptent aucune contrepartie en échange d’un reportage favorable.
Lonely Planet : un guide de référence, à la fois pratique et culturel, pour découvrir le nord de l’Italie