Le Toit du monde
Le plateau tibétain est l’une des régions les plus isolées au monde, délimité au sud par l’arc himalayen long de 2 500 km, à l’ouest par le Karakoram et au nord par les chaînes du Kunlun et de l’Altyn-Tagh, deux des massifs les moins explorés. Le nord-ouest, en particulier, est bordé par l’espace sauvage le plus reculé de la planète, en dehors des régions polaires. Quatre des dix plus hautes montagnes du monde enjambent la frontière sud du Tibet avec le Népal.
Le plateau possède aussi le plus grand nombre de glaciers de la planète en dehors des pôles, sources des grands fleuves d’Asie. On pense également que le haut plateau aurait un impact sur les courants-jets mondiaux et sur la mousson indienne. Avec une altitude moyenne de 4 000 m et de vastes étendues à bien plus de 5 000 m, le plateau tibétain mérite bien son titre de “toit du monde”.
La majeure partie du pays présente un paysage aride et inhospitalier, qui peut se décrire comme un désert de haute altitude. La mousson indienne peine à dépasser la ligne de partage des eaux himalayenne, l’une des raisons du peu de neige dans le “pays des Neiges” ! Des dunes de sable jalonnent la vallée de Samye et la route du mont Kailash.
Faune
Sur la route du mont Kailash, il n’est pas rare de voir des hardes de gazelles du Tibet (gowa en tibétain), d’antilopes (tso) et d’ânes sauvages (kyang), surtout le long de l’itinéraire. Pendant la saison de reproduction, les antilopes se rassemblent en groupes de plusieurs centaines d’individus.
Les randonneurs apercevront peut-être des ours noirs d’Asie ou, avec beaucoup de chance, de gigantesques ours bleus du Tibet en quête de nourriture dans les prairies alpines. Des hardes de moutons bleus, ou bharals (nawa na), s’observent souvent sur les pentes ou affleurements rocheux (le bharal nain est bien plus rare). L’argali, la plus grande espèce de mouton sauvage dans le monde, ne survit que dans les montagnes les plus reculées du Tibet occidental.
Des loups vivent sur le plateau tibétain. Bien plus rare que le loup noir, le loup blanc est l’un des animaux sacrés du Tibet. Parmi les plus petits carnivores figurent le lynx, la martre et le renard.
Vous verrez des marmottes (chiwa ou piya) dressées sur leurs pattes arrière en train de humer l’air à l’extérieur de leur terrier; elles produisent un son semblable à un cri d’oiseau quand elles se sentent menacées. Le pika (chipi), ou “lièvre criard”, un cousin du lapin, est également courant. Des pikas ont été observés sur l’Everest à 5250m d’altitude, ce qui en fait le mammifère ayant l’habitat le plus haut du monde.
Un nombre surprenant d’oiseaux migrateurs rejoignent les lacs du plateau tibétain au printemps et en été. Le pays compte plus de 30espèces d’oiseaux endémiques, et 480espèces ont été recensées sur le plateau.
Un écosystème fragile
Le Tibet est riche en ressources naturelles: nombreux minéraux, fort ensoleillement, vents puissants et rivières turbulentes qui fournissent en eau la moitié de la population mondiale.
Le bouddhisme tibétain a depuis longtemps souligné la relation complexe et interdépendante entre la nature et les êtres humains. En règle générale, le bouddhisme prône la modération et rejette la surconsommation, et tente d’éviter autant que possible la chasse, la pêche et l’abattage des animaux. Les nomades tibétains, en particulier, ont toujours vécu en harmonie avec leur environnement inhospitalier.
Le plateau tibétain possède de riches gisements d’or, de zinc, de chrome, d’argent, de bore, d’uranium et d’autres métaux. Il abrite aussi la majeure partie des énormes réserves de cuivre de la Chine. Une mine dans le Tibet septentrional contiendrait à elle seule plus de la moitié des gisements mondiaux de lithium, tandis que le Changtang renferme 5milliards de tonnes de pétrole et de gaz. Des rapports indiquent que l’exploitation minière représente aujourd’hui un tiers de la production industrielle du Tibet. Les Tibétains ont longtemps été hostiles à ce type d’exploitation, considérant qu’elle perturbait l’essence sacrée du sol. Le nom chinois du Tibet, Xizang –la Maison des trésors de l’Ouest–, semble aujourd’hui une ironique prophétie.
La modernisation rapide risque d’amener la pollution industrielle sur le haut plateau, un fléau jusqu’alors quasi inexistant. Le tourisme intérieur de masse commence aussi à peser, les déchets et leur traitement de manière non durable constituant un problème majeur dans des régions comme celles du Nam-tso et de l’Everest.