Résidence des souverains ottomans entre 1465 et 1830, le somptueux palais de Topkapi (1)(Topkapi Sarayi) renferme plus de récits pittoresques que tous les palais du monde réunis. C'est ici qu'une ancienne esclave russe, Roxelane, manœuvra pour devenir l'épouse de Soliman le Magnifique, que Selim l'Ivrogne se noya après avoir bu trop de champagne et qu'İbrahim le Fou perdit la raison après avoir été enfermé pendant 22 ans par son frère Murat IV.
L'ensemble donne à voir les extravagants vestiges de plusieurs siècles de folie, d'intrigues, d'excès et de guerre: immenses jardins autrefois éclairés par des bougies posées sur des tortues, ravissants pavillons parés de céramiques où se déroulaient les circoncisions et plates-formes dorées d'où les sultans contemplaient la Corne d'Or (Haliç) en déplorant peut-être leur vie recluse. Là, de grandes victoires furent célébrées par de fastueux banquets. Les dignitaires étrangers de l'époque ont été impressionnés par ses fameux eunuques noirs, ses musiciens réputés et ses élégants bâtiments construits pour des usages spécifiques.
Commencée par Mehmed le Conquérant et poursuivie par d'autres souverains aussi férus de philosophie et d'art que de conquêtes et de femmes, la collection exposée dans le palais est impressionnante. Le trésor contient des joyaux provenant des quatre coins de l'empire, le dortoir du corps expéditionnaire renferme de superbes costumes, les chambres fortes sacrées conservent de précieuses reliques islamiques – non loin de là, dans les étables impériales, d'autres trésors sont présentés dans les salles d'expositions temporaires.
Le harem est d'une telle splendeur qu'on oublie aisément que des femmes y passaient toute leur existence dans un univers entièrement clos. Achetées comme esclaves ou données en guise de cadeau par les potentats locaux, les jeunes filles y recevaient une éducation religieuse musulmane et apprenaient les coutumes turques, avant d'accéder, selon leurs mérites, au rang de dames d'honneur ou de sultane Validé (mère du sultant régnant). La légende veut qu'İbrahim le Fou, las de ses 280 concubines, ait ordonné de les mettre dans des sacs et de les jeter dans le Bosphore.
Prévoyez au moins une demi-journée pour la visite du palais. Ne manquez pas le trésor – notamment le poignard incrusté de pierres précieuses, au centre de l'intrigue de Topkapi (1964), film de Jules Dassin –, le harem et les bâtiments richement décorés qui entourent le bassin de la quatrième cour.