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Publié le 10/10/2015 5 minutes de lecture
Il est difficile d’imaginer un bout de terre reculé plus inaccessible que Sainte-Hélène. Après tout, cette île, en apparence perdue au milieu de l’Atlantique Sud, a été choisie comme lieu d’exil pour Napoléon. Mais elle réserve bien des récompenses aux voyageurs, qui pourront randonner au milieu de prairies alpines ou de rochers escarpés qui s’élèvent vers le ciel, prendre la mer en bateau, ou encore explorer les villages historiques tout en s’arrêtant pour discuter avec les habitants accueillants.
Jamestown et ses maisons géorgiennes
Jamestown, la capitale de Sainte-Hélène, est soigneusement blottie entre l’océan Atlantique et les flancs escarpés d’un ravin étroit. Fondée en 1659 par les colons anglais, et devant son nom à Jacques II, alors duc d’York, Jamestown compte plusieurs sites historiques et de nombreux presbytères géorgiens. Un musée intéressant contient des objets et des récits de la longue histoire de l’île, notamment les caisses en bois qui ont servi à transporter les effets de Napoléon vers son lieu d’exil. Derrière le musée, après une collection d’anciens canons, se trouve l’Échelle de Jacob, un escalier abrupt de 699marches qui monte dangereusement en haut du ravin de Half Tree Hollow (s’il ne mène pas au paradis, comme son prédécesseur biblique, il offre tout au moins une vue divine).
De retour en ville, vous pourrez voir l’un des nombreux clins d’œil à Napoléon: une effigie de l’empereur en tenue se tient sur le balcon du premier étage du Consulate Hotel, regardant un manoir bleu portant le nom de son ennemi juré, le duc de Wellington. Mais, contrairement au mythe, le duc n’y a pas résidé durant ses visites –il passait son temps dans l’ancienne (Old) Porteous House, aujourd’hui démolie.
Un autre site, qui ne semblerait pas déplacé au cœur de l’Angleterre rurale, est l’église St James, située de l’autre côté des douves, derrière une porte, en contrebas du château fort restauré.
Half Tree Hollow et les rochers escarpés au-dessus de Jamestown
Les visiteurs qui empruntent l’Échelle de Jacob se retrouveront, après avoir croisé des nuées d’oiseaux tropicaux blancs virevoltant, à Half Tree Hollow, la plus grande ville de Sainte-Hélène (pour les moins sportifs, des voitures et des minibus empruntent la route sinueuse depuis Jamestown). De là, la vue est spectaculaire: elle s’étend des falaises abruptes au-dessus de Jamestown jusqu’aux montagnes verdoyantes d’un côté, et au bleu infini de l’Atlantique Sud de l’autre. Sur les hauteurs de Half Tree Hollow se tient High Knoll Fort, avec son donjon arrondi entouré de longs murs, un bastion construit en 1798 contre les invasions.
De l’autre côté du ravin, un sentier (qui part de Napoleon Street à Jamestown) grimpe en travers jusqu’à la paroi rocheuse de Rupert's Bay, passant devant la batterie de Munden et les emplacements de canons centenaires construits dans les falaises. Derrière la batterie, des falaises plongent verticalement jusqu’à l’océan Atlantique, tandis que se profile au loin la masse sombre et austère du Sugar Loaf de Sainte-Hélène, avec son énorme bosse carrée couronnant son sommet.
Jonathan et la Plantation House
Au cœur d’une vallée boisée, à quelques kilomètres de Jamestown, se trouve la Plantation House, un manoir géorgien construit entre 1791 et 1792. Son habitant le plus distingué n’est probablement pas le gouverneur mais Jonathan, une tortue des Seychelles âgée de plus de 180ans. Quand elle ne somnole pas, elle se déplace lentement sur la pelouse à la recherche d’un repas. Des potagers parsèment les coteaux à proximité et une étroite crique s’étend jusqu’à l’Atlantique sud. De la maison, un petit chemin mène à travers des bois épais et une forêt de bambous géants jusqu’à des tombes d’esclaves datant du milieu du XVIIIesiècle.
Les résidences de Napoléon
Longwood House, la dernière demeure de Napoléon, est une villa aux volets verts perchée sur les hauts plateaux émeraude de l’île. Bien qu’offrant à l’ancien empereur de belles vues sur Flagstaff, une colline émeraude en forme de cône, et The Barn, un énorme rocher rectangulaire, les températures n’y étaient pas clémentes (une dizaine de degrés de moins que sur la côte). Onze des chambres, toutes de couleur vert impérial, contiennent de nombreux meubles d’origine, ainsi que des bustes de Napoléon et de ses épouses. Notez les deux trous dans les volets, que Napoléon aurait taillés pour pouvoir espionner ses gardes avec son télescope.
En contrebas d’une allée d’arbres, près de Longwood House, Geranium Valley est une paisible charmille fleurie. C’est ici, surplombant le ravin de Devil's Punch Bowl, que fut enterré Napoléon en 1821. La tombe ne porte pas de nom en raison des différences anglo-françaises de formulation. Son corps fut finalement rapatrié àParispour des funérailles nationales 19ans plus tard. Avant Longwood House, Napoléon passa sept semaines au Briars Pavilion, un chalet d’une chambre dans une vallée entourée de collines boisées. À l’intérieur, il y a une table et divers souvenirs napoléoniens. Longwood House et Briars Pavilion ont toutes deux été cédées à laFrance, comme le montre le drapeau tricolore qui flotte à l’extérieur des deux maisons.
Les marches “boîtes aux lettres”
L’incroyable variété de terrains et la petite taille de l’île –seulement 16km de long et moins de 10km de large– la rendent idéale pour la randonnée. La collectivité y a créé 20marches “boîtes aux lettres”, certaines faciles, d’autres modérées ou encore très difficiles. À la fin de chaque marche, une boîte aux lettres, d’où leur nom, contient un tampon et un livre d’or.
Celle près de Jamestown mène à l’impressionnante Heart Shaped Waterfall (la cascade en forme de cœur). D’autres, comme Diana’s Peak, emmènent les visiteurs vers des hauts sommets inaccessibles en 4x4, ou vers des sites populaires tels que la plage de Sandy Bay, en passant par des versants magnifiques mais traîtreusement abruptes.
Le tour des remparts par la mer
Une croisière autour de l’île est le meilleur moyen d’appréhender les fortifications naturelles imprenables de Sainte-Hélène. Depuis la mer, les énormes rochers, d’un gris sombre, avec parfois un soupçon de vert, sont encore plus menaçants. Le bateau est également le meilleur moyen de découvrir la vie marine de l’île. Trois espèces différentes de dauphins flirtent régulièrement avec la surface, tout comme les baleines à bosse pendant l’hiver austral. Les écosystèmes coralliens bien protégés de Sainte-Hélène et les espèces de poissons endémiques qui les habitent font de la plongée une agréable addition à toute sortie en mer.
La découverte de Sainte-Hélène en voiture
Partir sur la route en voiture est une expérience merveilleuse sur Sainte-Hélène, où le paysage change à chaque tournant. Fleurs sauvages, plantations de café (Napoléon adorait le café de l’île), cascades, forêts de pins de Norfolk et d’eucalyptus d’Australie, tapis de lin deNouvelle-Zélandeondulant dans le vent… C’est un véritable kaléidoscope. Au-dessus de tout cela, des canaris jaunes et des cardinaux rouges viennent ajouter leur touche de couleur.
Au sud-est de l’île, la route serpente abruptement au-dessus des collines verdoyantes et des toits rouges du village de Sandy Bay, avec pour toile de fond un énorme monolithe du nom de Lot et une succession de crêtes escarpées. Quatre pinacles découpés -l’un d’eux est la femme de Lot- déchirent le ciel. Sur la plage de Sandy Bay, le paysage devient totalement aride, l’océan bleu s’échouant contre les affleurements volcaniques. Au-dessus, les Gates of Chaos (portes du chaos), d’énormes rochers formant une crête acérée, évoquent un décor digne de laPlanète des singes.