Arménie

Arménie : culture et traditions

Le Rabiz

Le mot rabiz vient de la contraction des mots russes rabotchi iskousstvo (“art des travailleurs”). Il désigne une manière de s’amuser et un mode de vie. Il pourrait même s’incarner dans l’archétype de l’homme portant chemise de soie et chaînes en or, qui conduit à toute allure, cigarette aux lèvres et téléphone portable collé à l’oreille. Si vous interrogez un étudiant branché, il vous répondra que la culture populaire arménienne se divise en deux tendances: d’un côté, la culture rabiz, bruyante et tape-à-l’œil, de l’autre, tout ce qui est de bon goût. Le rabiz désigne aussi un argot très inventif. En musique, le rabiz est la musique des conducteurs de marshroutka, un mélange de pop bas de gamme et de ballades exagérément tragiques qui font vibrer la corde du sentimentalisme moyen-oriental dans le cœur des Arméniens. Les fans veulent une musique qui les fasse pleurer, danser, et des chansons d’amour passionnées. Ce genre de musique joue à plein volume dans les taxis grecs, russes, turcs et arabes. Dans sa forme arménienne, on l’entend à Los Angeles, Beyrouth, Moscou et Erevan, jusque tard dans la nuit dans les bars de quartier, les discothèques et les restaurants de khorovats (grillades).

Arts visuels

Les galeries d’art, ateliers d’artistes et maisons-musées sont suffisamment nombreux à Erevan pour occuper plusieurs semaines. Les miniatures et la microsculpture sont très présentes dans l’art arménien. Il faut notamment voir les œuvres d’Eduard Ter-Ghazaryan, de Sisian. Elles nécessitent un microscope pour être pleinement appréciées. Des exemples de son travail sont visibles à l’église de Sisavan.

Martiros Sarian est l’un des plus célèbres peintres arméniens. Son atelier est conservé dans un musée d’Erevan. Une sculpture à son effigie, dans un parc d’Erevan, trône au centre du marché d’art. C’est là que les peintres se rassemblent pour vendre leurs œuvres et les exposer à la critique des autres artistes. La plupart des tableaux se caractérisent par une iconographie religieuse et des paysages typiquement arméniens. Yervand Kochar possède sa propre galerie de portraits à proximité, dans Moscovyan Poghots.

Yousuf Karsh fut un grand photographe portraitiste. On lui doit un cliché fameux de Winston Churchill, à qui il avait retiré son cigare pour l’occasion. D’où la mine sombre de l’homme d’État britannique sur la photo…

Les manuscrits enluminés conservés au Matenadaran d’Erevan et dans les bibliothèques d’Echmiadzin témoignent de siècles d’art monastique.

Théâtre et danse

Le théâtre est profondément ancré dans la culture arménienne. En témoigne une forteresse du Xesiècle à Saimbeyli, en Cilicie, qui comptait trois étages de théâtres et deux de bibliothèques.

Les rois helléniques d’Arménie aimaient particulièrement cet art au IIIesiècleav.J.-C., et l’on jouait des tragédies grecques pour le roi TigraneII le Grand. Erevan compte une bonne dizaine de salles, spécialisées dans la comédie musicale, le théâtre classique et contemporain. Les comédies musicales et spectacles pour enfants, très professionnels, sont faciles à suivre, même pour un public étranger.

La tradition des danses folkloriques reste très vivace, et vous verrez sûrement une danse ou une autre sur une place. Si possible, ne manquez pas non plus les fêtes de mariage à la campagne, pour leur authenticité. Danses et costumes sont d’une grande diversité, et semblent tout droit sortis d’une fête de printemps médiévale. À Erevan, il y a également des compagnies de danse et de ballet classique.

Musique

Les harmonies complexes de la musique sacrée arménienne sont en partie perdues. Subsiste tout de même le raffinement mélancolique des chœurs de la liturgie arménienne. Komitas compte parmi les grands compositeurs des XIXe et XXesiècles. Ses œuvres pour chant choral et orchestre ont fait connaître mondialement la musique arménienne. Quant à Armen Tigranian, il est surtout connu pour son opéra Anoush. Aram Khatchatourian s’est distingué par sa fameuse Danse du sabre et le ballet Spartacus. Bien avant eux, Sayat Nova, souvent considéré comme le plus grand troubadour et compositeur du Caucase du Sud, a commencé sa carrière à la cour d’HéracliusII de Géorgie. À cause de son amour interdit pour la fille du roi, il fut contraint à l’exil. L’Arménie reste un haut lieu de la musique classique. Elle compte une salle de ballet classique, un opéra, et des orchestres de musique de chambre et symphonique. Cette scène musicale est étayée par le travail de nombreux compositeurs et artistes.

La musique folklorique est elle aussi bien vivante grâce aux groupes, clubs et autres restaurants traditionnels de khorovats. Pour s’émerveiller de la multiplicité des talents, il suffit de passer une soirée dans une salle populaire comme Ashtaraki Dzor à Ashtarak. Le duduk, instrument en bois d’abricotier à double anche de roseau, vous accompagnera tout au long de votre voyage. Ses trilles s’entendent aussi bien dans la musique traditionnelle que dans les airs de pop moderne que crachent à plein volume les baffles des taxis.

Pour écouter de la bonne musique traditionnelle, découvrez Djivan Gasparian, maître du duduk dont les albums sont produits par RealWorld, un label de qualité. Mentionnons aussi Parik Nazarian, Gevorg Dabagian et l’album Minstrels and Folk Songs of Armenia de Parseghian Records.

Parmi les artistes du moment, il faut entendre Lilit Pipoyan, chanteuse et compositrice évoquant un peu Joni Mitchell, ainsi que Vahan Artsruni, compositeur et guitariste folk. Ce dernier est très présent sur la petite mais dynamique scène musicale d’Erevan.

Les jeunes chanteurs sont également nombreux, le spectre allant d’Hasmik Karapetian, homologue arménienne de Céline Dion, au groupe de speed metal Vordan Karmir.

Cinéma

Les studios ArmenFilm, sur la route qui va d’Erevan à Ashtarak, jadis prospères, sont aujourd’hui moribonds. Sergueï Paradjanov (Sarkis Paradjanian), né à Tbilissi, fut “encouragé” par les autorités soviétiques à accoler le suffixe russe “ov” à son patronyme. Souvent censuré par les puissants de la culture, il est pourtant parvenu à sortir des films à la théâtralité visionnaire, comme La Couleur de la grenade. Sa créativité artistique lui valut quatre ans d’emprisonnement dans un camp de travail soviétique. Après sa libération en 1977, il tourna entre autres La Légende de la forteresse de Souram et Achik Kérib, conte d’un poète amoureux. Son dernier chef-d’œuvre, La Confession, reste inachevé. Si ses films n’ont pas rencontré le succès en URSS, le cinéaste a eu de nombreux admirateurs à l’étranger, parmi lesquels Federico Fellini et Bernardo Bertolucci.

Canadien d’origine arménienne, le cinéaste Atom Egoyan a tourné plusieurs films ayant pour thème l’Arménie. Citons notamment Calendar (1993) et Ararat (2002), mise en abîme cinématographique sur le génocide. Ararat est typique du goût d’Atom Egoyan pour le cinéma d’art et d’essai, et souligne l’importance accordée à la forme. La complexité de la structure narrative et de l’intrigue fait écho à celle de l’histoire arménienne. Dans Calendar, son autre grand film, Egoyan raconte l’histoire d’un photographe envoyé en Arménie pour prendre des clichés d’églises destinés à illustrer un calendrier. L’intrigue principale, celle d’un amour perdu, se complique de nombreux tours et détours. L’essentiel des dialogues est né de l’improvisation.

Here (2010), film américain de Braden King, se déroule en Arménie. Le film raconte l’interlude romantique entre un ingénieur de cartographie satellite américain et une Arménienne de la diaspora de retour au pays.

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