Îles Canaries

Îles Canaries : culture et traditions

Arts

Architecture

Dans l’archipel, la plupart des constructions préhispaniques ont été soit lourdement restaurées, soit entièrement reconstituées. Les Guanches vivaient principalement dans des grottes et, de leurs maisons rudimentaires, il reste peu de choses. Il existe quelques sites d’une grande valeur archéologique, à la Grande Canarie et à Fuerteventura, mais vous y verrez uniquement des ruines ou les fondations des édifices. Vous pourrez toutefois vous faire une bonne idée du type d’habitations construites à l’époque préhispanique. Un exemple sur la route de Pozo Negro à Fuerteventura : le Poblado de La Atalayita est constitué des vestiges d’un village, dans un paysage lunaire. Vous entendrez peut-être parler d’“architecture canarienne typique”, mais les influences ont été si nombreuses au fil des siècles qu’il est difficile de la définir. Il n’est d’ailleurs pas rare qu’un édifice soit marqué par plusieurs styles architecturaux distincts.

Peinture et sculpture

Les Guanches

Les premiers artistes canariens furent naturellement les Guanches : certaines de leurs belles peintures rupestres sont encore visibles dans plusieurs sites dont la Cueva Pintada, à Gáldar (Grande Canarie). Essentiellement géométriques, leurs motifs ont inspiré des artistes canariens de grande renommée, tel Manolo Millares (1926-1972), natif de Las Palmas de Gran Canaria, mais aussi les décors omniprésents qui ornent aujourd’hui T-shirts, souvenirs et céramiques. La plus populaire des sculptures de ces premiers artistes est l’Ídolo de Tara, retrouvée à la Grande Canarie, une idole guanche en terre cuite aux opulentes courbes féminines que vous retrouverez elle aussi sur des tissus et en reproductions de terre cuite.

Artistes du XVIIe au XIXe siècle

Au XVIIe siècle, le Tinerfeño Gaspar de Quevedo est le premier grand peintre canarien. Sa relève est assurée au siècle suivant par Cristóbal Hernández de Quintana (1659-1725), dont les œuvres ornent encore la Catedral de La Laguna, à Tenerife. Plus marquant, Juan de Miranda (1723-1805) est l’auteur de chefs-d’œuvre comme La Adoración de los pastores (L’Adoration des bergers) de l’Iglesia de Nuestra Señora de la Concepción à Santa Cruz de Tenerife. Au XIXe siècle, Valentín Sanz Carta (1849-1898) fut l’un des premiers peintres paysagistes canariens, de même que Lorenzo Pastor et Lillier y Thruillé, dont on peut voir des œuvres au Museo de Bellas Artes de Santa Cruz de Tenerife. Le principal représentant de l’impressionnisme canarien fut Manuel González Méndez (1843-1909), dont La verdad venciendo el error (La Vérité triomphant de l’Erreur) est exposée à l’ayuntamiento (hôtel de ville) de Santa Cruz de Tenerife.

XXe siècle

Le Cubano-Canarien José Aguiar García (1895-1976), né de parents gomeros, grandit à Cuba. Peintre prolifique, il atteignit le sommet de son art avec la fresque. On peut voir ses œuvres dans tout l’archipel : le Friso isleño (frise insulaire) se trouve au casino de Santa Cruz de Tenerife. Tous les grands courants artistiques européens ont laissé leur empreinte aux Canaries. On citera les peintres Francisco Miranda Bonnin (1911-1963) et Jesús Arencibia (1911-1993), auteur de la grande fresque de l’Iglesia de San Antonio Abad à Las Palmas de Gran Canaria. La première exposition surréaliste d’Espagne se tint à Santa Cruz de Tenerife le 11 mai 1935. Le plus illustre représentant canarien de ce mouvement, le Tinerfeño Óscar Domínguez (1906-1957), s’installa à Paris en 1927 et fut fortement influencé par Picasso. On retient également le cubiste Antonio Padrón (1920-1968), à qui est dédié un magnifique musée installé dans son ancien atelier, sur l’île de la Grande Canarie. L’art abstrait canarien a pour fer de lance Manuel Millares (1921- 1972), tandis qu’Alberto Manrique (né en 1926), originaire de la Grande Canarie, peint des œuvres spectaculaires et perturbantes en déjouant les lois de la perspective. Une partie de son travail est exposé au Centro de Arte Canario, à La Oliva, Fuerteventura.

Artisanat canarien

Les Canaries possèdent une tradition artisanale bien ancrée, avec même une spécialité pour chaque île. Vous trouverez nappes, serviettes et autre linge de table brodé et garni de délicates dentelles dans tout l’archipel, Ingenio (Grande Canarie), Mazo (La Palma) et La Orotava (Tenerife) étant particulièrement connues pour leurs broderies. Attention toutefois aux importations chinoises vendues pour des produits locaux, notamment sur les marchés. Outre les signes extérieurs de qualité, le prix est un bon critère pour reconnaître une pièce authentique : fruit d’un long et dur labeur, les broderies artisanales ne sont pas bon marché. On assiste cependant à une baisse générale des prix, du fait de la désaffection dont souffrent aujourd’hui ces textiles. Avec leurs couleurs vives et leurs rayures pleines de simplicité, les tapis de laine, plus intemporels, sont toujours fabriqués avec art sur des métiers à tisser manuels. Vous pourrez aussi rapporter des Canaries de la vannerie, des poteries inspirées des Guanches, diverses céramiques et des chapeaux de paille de toutes sortes.

Musique

Emblématique du patrimoine musical canario, le timple est une sorte d’ukulélé d’origine mal connue, peut-être introduit dans l’archipel au XVe siècle par les esclaves berbères. C’est un petit instrument à 4 ou 5 cordes aux sonorités aiguës. Vous verrez cet instrument dans toutes les fêtes traditionnelles, interprétant des danses telles que l’isa et la folía et, si vous êtes en veine, le tajaraste, qui, tout populaire qu’il soit demeuré à La Gomera, serait la seule danse des Guanches arrivée jusqu’à nous.

Culture

Identité régionale

Il est difficile de synthétiser toutes les communautés et traditions existant dans un archipel de 7 îles. Les habitudes, les expressions, la cuisine et la musique varient sensiblement d’une île à l’autre et les rivalités sont fortes, notamment entre les poids lourds que sont Tenerife et la Grande Canarie. Mais l’archipel tout entier se caractérise par une même fierté d’être canarien et la conviction que l’histoire et la culture des îles les distinguent du reste de l’Espagne. Si la plupart des Canariens présentent les mêmes traits typiquement méditerranéens que les Espagnols (cheveux foncés, regard ténébreux et teint mat), vous verrez probablement qu’ils ne se pensent pas aussi Espagnols que cela. Au lendemain de la victoire des socialistes, en 1982, les Canaries devinrent une comunidad autónoma, l’une des 17 régions autonomes qui composent l’Espagne. Certains Canarios véhéments aimeraient voir leur archipel accéder à l’autonomie totale : en témoignent les graffitis “Canarias no es España” (les Canaries, ce n’est pas l’Espagne), ‘Viva Canarias Libre’ (Vive les Canaries libres !) ou “Godos fuera” (Les Espagnols dehors !). Le drapeau de la région est une bannière tricolore blanc-bleu-jaune, à laquelle certains independentistas ajoutent 7 étoiles représentant les îles. La division de l’archipel en deux provinces, Santa Cruz et Las Palmas, persiste, tout comme les rivalités entre elles : le gouvernement régional dispose ainsi de bureaux dans les deux capitales provinciales, qui assument de plus, tour à tour, tous les 4 ans, le rôle de capitale régionale.

Mode de vie

Le plus grand bouleversement qu’ait connu la vie aux Canaries aura été celui du tourisme. À partir des années 1960, cette société essentiellement agricole en est venue en seulement quelques décennies à dépendre largement du secteur des services. L’emploi traditionnel sur des petites fincas (propriétés rurales) ou dans les villages de pêcheurs a été détrôné par des emplois touristiques. Le passage de la vie rurale et traditionnelle aux cadences plus rapides de la modernité adoptées dans le reste de l’Espagne s’accompagned’inévitables problèmes. Le coût de la vie s’est envolé, contraignant les Canariens qui ont conservé leurs emplois dans l’agriculture à compléter leurs revenus en travaillant dans le tourisme. L’éducation pose un autre problème : les petites îles n’ayant pas d’université, les jeunes doivent étudier à Tenerife ou à la Grande Canarie, ce qui peut grever un budget familial déjà serré. Une fois diplômés, de nombreux Canariens finissent par quitter leur île pour trouver de meilleurs postes à Tenerife, à la Grande Canarie ou sur le continent. La nécessité conduit de nombreuses familles à vivre séparées. Les valeurs familiales n’en restent pas moins le cœur de la culture canarienne. Les grandes fêtes de chaque île se passent souvent en famille, et des Canariens expatriés sur le continent américain n’hésitent pas à faire le voyage pour retrouver leurs amis et leurs proches. La plupart des festivités religieuses et culturelles sont également familiales : si la famille est plus réduite que jadis (un ou deux enfants en général), elle reste une unité sociale importante. Comme ailleurs en Europe, les couples attendent davantage avant de se marier et pour avoir des enfants, ce qui montre que la société canarienne n’est plus aussi traditionnelle qu’auparavant.

Sports

Les Canaries sont une destination propice aux sports grâce à leur climat doux et ensoleillé, à leur long littoral et à leur mode de vie décontracté qui fait la part belle au plein air. S’agissant d’une région d’Espagne, le sport favori est sans surprise le football. Si les Canaries possèdent bien leur équipe de football régionale, celle-ci n’est membre d’aucune fédération (ni la FIFA, ni l’UEFA, ni la CAF), l’archipel étant représenté à l’international par la sélection nationale espagnole. L’équipe canarienne ne joue que des matchs amicaux. Plus exotique, la lucha canaria (lutte canarienne) remonterait aux Guanches, un peuple de robustes guerriers très portés sur les épreuves de force, qu’il s’agisse de sauter par-dessus les précipices, de plonger depuis de vertigineux promontoires ou de combattre corps à corps. Un membre de chaque équipe se place en face de son adversaire sur le terrain et, passés le salut protocolaire et quelques autres manifestations de bonne volonté, chacun tente de faire mordre la poussière à l’autre. Aucune partie du corps à l’exception de la plante des pieds ne doit toucher le sol, et le premier à manquer à cette règle perd la partie.

Multiculturalisme

Cette région jadis terre d’émigration affiche aujourd’hui un solde migratoire nettement excédentaire. Des travailleurs des secteurs de l’hôtellerie, de la restauration et du bâtiment, tout comme les Européens du Nord en quête de soleil toute l’année, soutiennent la croissance démographique de l’archipel. Avec près d’un demi-million de lits disséminés dans les hôtels, appartements et maisons de toutes les Canaries, on constate une arrivée régulière de voyageurs du monde entier, mais surtout d’Europe. Certains décident parfois de s’installer ici. Plus récemment, on voit arriver des immigrants descendants de Canarios partis au Venezuela ou ailleurs en Amérique du Sud et désireux de retrouver la terre de leurs ancêtres. Dans le passé, les Canaries ont connu d’importants problèmes avec les migrants illégaux arrivant en nombre des côtes africaines. Ces dernières années, le nombre de bateaux de migrants illégaux a considérablement chuté, même si les habitants s’inquiètent toujours de la situation. Sans généraliser à l’ensemble de la population canarienne, certains touristes d’origine africaine font état de discrimination, surtout dans les magasins et les restaurants, et en particulier dans les stations balnéaires du sud de Tenerife.

Religion

Le catholicisme s’est fort bien implanté aux Canaries. La plupart des Canarios sont baptisés et ont fait leur première communion, sont mariés et enterrés selon les rites catholiques et vont à l’église pour les grandes fêtes religieuses – ils sont toutefois de plus en plus rares à se rendre régulièrement à la messe dominicale. De plus, les fiestas colorées et endiablées qui rythment le calendrier canarien ont souvent une origine ou un contexte religieux.

Voir aussi

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